Une démarche de soins palliatifs éprouvée suscite des conversations nécessaires sur la qualité de vie

nov. 01, 2019

novembre 2019

Membres de l'équipe Wing Kei

Membres de l’équipe Wing Kei
À l’arrière : Peggy Tan, Sandra Sliz et Emily Dymchuk
À l’avant : Cecilia Cao et Grace Hung

Des organismes de santé répartis dans cinq provinces et un territoire ont décidé de mettre en place une innovation éprouvée qui aide à entamer plus tôt la discussion sur les souhaits et les objectifs de soins avec les résidents.

Ces organismes participent au projet collaboratif de diffusion de l’intégration d’une démarche palliative dans les soins (IDPS) de la Fondation canadienne pour l’amélioration des services de santé. Conçue par Vancouver Coastal Health et implantée dans 48 de ses établissements de soins de longue durée, cette approche a réduit de 56 % les transferts aux services d’urgence et de 45 % le nombre de jours passés en soins de courte durée en fin de vie.

Parmi les participants au projet, notons le réseau albertain Institute for Continuing Care Education and Research [Institut d’éducation et de recherche en soins continus] (ICCER). Quatre organismes membres, situés à Edmonton et à Calgary, ont choisi de se lancer.

« Les établissements nous disent que le personnel tend à éviter de parler de la mort. Alors les patients se retrouvent dans des situations d’urgence et ne décèdent pas à l’endroit où ils veulent, explique Emily Dymchuk, coordonnatrice de programme pour l’ICCER. Nous avons vu l’IDPS comme une occasion de régler les problèmes dans les soins continus prodigués par nos membres qui ne disposent ni des ressources ni des effectifs pour mettre sur pied des projets en lien avec les soins palliatifs. »

En participant au projet collaboratif de la FCASS, les membres de l’ICCER ont appris à : • cibler les résidents qui bénéficieraient d’une approche palliative des soins; • discuter des objectifs de soins avec le résident ou son mandataire; • élaborer et mettre en œuvre un plan de soins de santé intégrés, adapté aux souhaits de chaque résident.

Les personnes admises en soins de longue durée y restent en moyenne deux ans, en général jusqu’à la fin de leur vie. Parmi les résidents qui sont décédés en établissement en 2016-2017, 24 % étaient considérés comme ayant moins de six mois à vivre; 22 % d’entre eux et 6 % de l’ensemble des résidents décédés (toutes espérances de vie confondues) avaient, selon leur dossier, reçu des soins palliatifs dans leur dernière année de vie.

Déjà, à mi-chemin dans la réalisation du projet, les membres de l’ICCER ont indiqué que le personnel, les patients et les familles étaient moins mal à l’aise de s’entretenir sur des sujets délicats. Et bon nombre de participants ont créé leurs propres moyens de diffusion des démarches palliatives.

Tatsiana Haidukevich est infirmière autorisée et gestionnaire de cas pour le Centre de soins de longue durée St. Michael’s, à Edmonton. Selon elle, les ressources du bureau virtuel et les ateliers, webinaires et appels d’encadrement de la FCASS offerts dans le cadre du projet ont aidé l’établissement à améliorer ses pratiques.

« Faire partie d’un réseau et pouvoir échanger sur nos expériences nous a donné un vrai bon coup de pouce », reconnaît-elle. En se servant de l’IDPS comme modèle, le Centre St. Michael’s a sensibilisé son personnel à la valeur des approches palliatives et lui a enseigné comment discuter avec les résidents et consigner leurs réponses afin que leurs souhaits soient respectés. « Les employés étaient réticents à l’idée que ce soit des infirmiers ou d’autres personnes – plutôt que des médecins ou les familles – qui amorcent les conversations sur la fin de vie. Mais nous sommes de plus en plus à l’aise. On constate maintenant que la majorité d’entre nous veut bien parler de la fin de vie, mais ne sait juste pas par où commencer. »

Bethany, un organisme membre de l’ICCER qui offre le logement et des services de soutien à des personnes âgées et à des adultes handicapés dans six villes albertaines, a enseigné les principes d’IDPS à 90 % de ses employés. L’organisme a déjà prévu donner au personnel infirmier, aux gestionnaires des services de santé, aux aumôniers et aux travailleurs sociaux une formation sur la procédure de planification préalable des soins et sur des stratégies pour parler de maladies graves avec les résidents et leur famille. Bethany a beaucoup innové, produisant entre autres un document sur les soins palliatifs et de fin de vie à l’intention des résidents et de leur famille, à leur remettre lorsqu’ils visitent l’établissement après l’admission.

Wing Kei est un organisme à but non lucratif de Calgary qui fournit aux aînés des soins culturellement adaptés (Wing Kei signifie « glorifier Dieu » en chinois). Peggy Tan, responsable des soins axés sur la personne et la famille, a sondé les employés et les proches des patients à propos des principes d’IDPS, et elle compile présentement les résultats. Le conseil d’administration compte au moins un médecin pour l’aider à informer le personnel et les familles sur les approches palliatives. Elle a d’ailleurs officiellement entrepris des démarches visant à offrir une formation en la matière.

« La notion d’approche de soins palliatifs et de fin de vie n’est pas nouvelle pour Wing Kei, mais grâce au projet d’IDPS, l’équipe et l’organisme a facilement pu la présenter comme un changement de culture, précise la responsable. L’objectif est d’enseigner au personnel à faire participer les familles à la planification préalable des soins et à entamer avec plus d’aisance la discussion sur les maladies graves. »

L’organisation Lifestyle Options Retirement Communities, qui regroupe six établissements en Alberta, s’est engagée a suivre une démarche d’intégration des soins palliatifs prolongée et durable. Utilisant le modèle ADKAR (awareness [prise de conscience], desire [désir], knowledge [connaissance], ability [compétence], reinforcement [renforcement]) du groupe Prosci Research dans la planification et la mise en œuvre, elle en est à faire prendre conscience des besoins aux parties prenantes et à stimuler leur désir de participation afin qu’ils comprennent, défendent et soutiennent le projet.

« Il nous reste encore à faire tomber les préjugés liés au mot “palliatif”, pour que les gens ne pensent pas systématiquement à la mort quand nous abordons le sujet, explique Cherryll dela Cruz-Cabalo, responsable de la gestion de la qualité et du risque et responsable clinique chez Lifestyle Options. On ne devrait pas voir les soins palliatifs seulement comme une question de mort, mais aussi comme une question de vie. »