Le défi
Dans les foyers de soins de longue durée au Canada,
un résident sur trois prend des médicaments
antipsychotiques sans un diagnostic de psychose. Ces
médicaments sont utilisés pour gérer les comportements
difficiles associés à la démence. De 2002 à 2005, Santé
Canada a lancé plusieurs avertissements concernant
l’utilisation des antipsychotiques dans la démence.
La recherche a montré que ces médicaments peuvent
augmenter le risque de mortalité, d’accident vasculaire
cérébral et de fractures de la hanche, et réduire la qualité
de vie. Choisir avec soin, une campagne nationale
organisée en partenariat avec l’Association médicale
canadienne, vise à encourager le dialogue entre les
médecins et les patients au sujet des examens, des
traitements et des interventions inutiles, y compris les
médicaments antipsychotiques pour les patients atteints
de démence.
Dans les foyers de soins personnels (FSP) de l’Office
régional de la santé de Winnipeg (ORSW), 24 % des
résidents prenaient des médicaments antipsychotiques
sans un diagnostic de schizophrénie, d’hallucination
ou de la maladie de Huntington à l’appui. Or, ces
médicaments présentent peu d’avantages et des risques
importants pour les résidents, en plus d’être coûteux.
La solution
Une équipe interdisciplinaire du Programme de soins
de longue durée de l’ORSW a travaillé de concert avec la
Fondation canadienne pour l’amélioration des services
de santé afin de réduire l’utilisation inappropriée des
médicaments antipsychotiques. La gestionnaire de
pharmacie Allison Bell, la gestionnaire des initiatives
Joanne DiNicola et le directeur des outils RAI-MDS (ou
Resident Assessment Instrument – Minimum Data Set)
d’aide à la décision Michael Haip ont centré leur projet
d’amélioration FORCES sur la réévaluation, par une
équipe d’infirmiers, de prescripteurs et de pharmaciens,
des médicaments antipsychotiques lors de l’examen
trimestriel de la médication.
Le processus TRAIL (Team Review of Antipsychotics
in Long Term Care ou examen en équipe des
antipsychotiques en soins de longue durée) a été
mis en oeuvre pour encourager la collaboration
des médecins, des pharmaciens et des infirmiers
dans l’examen trimestriel de la médication. Il a
été conçu en lien avec le travail découlant d’un
projet d’amélioration FORCES qui a été mené
précédemment et qui portait sur la prestation de la
formation sur les soins liés à la démence à l’aide de
P.I.E.C.E.S.TM, une approche non pharmacologique centrée sur la personne qui aide les prestataires des
services de santé à gérer les comportements difficiles
des patients atteints de démence sans recourir, dans la
mesure du possible, aux médicaments.
Grâce au projet TRAIL, les médecins ont reçu des
rapports individualisés confidentiels des pratiques
des prescripteurs décrivant les médicaments
antipsychotiques prescrits du Réseau pharmaceutique
informatisé (RPI), ainsi que des données provenant
de l’évaluation RAI-MDS sur les caractéristiques de
leurs résidents et des recommandations factuelles
sur les médicaments antipsychotiques. Les médecins
prescripteurs ont été encouragés à prendre en compte
cette information dans l’examen trimestriel de
la médication.
Le personnel infirmier a assisté à des séances de
formation portant sur un examen des médicaments
antipsychotiques, sur une introduction au processus
TRAIL ainsi que sur la façon d’utiliser non seulement
un outil de surveillance des antipsychotiques, mais
aussi les échelles de résultats RAI-MDS. Cette
formation a eu lieu en même temps que celle offerte
au personnel infirmier et de soutien et aux familles
sur l’approche P.I.E.C.E.S.™. Alors que les pharmaciens
inscrivaient les médicaments antipsychotiques sur
le formulaire d’examen trimestriel des médicaments
transmis aux FSP avant ledit examen, les infirmiers
préparaient le prochain en passant en revue les
cas des résidents qui prenaient des médicaments
antipsychotiques, en discutant des candidats potentiels
pour la réduction avec l’équipe du service et en
appliquant des outils d’évaluation appris au cours de la
formation P.I.E.C.E.S.™.
Lors de l’examen trimestriel de la médication mené
dans le cadre du projet collaboratif, l’équipe de soins
de santé a évalué la pertinence des médicaments
antipsychotiques et a décidé si la médication des
résidents doit être poursuivie, diminuée graduellement
ou arrêtée.
Les résultats
Le projet a connu un succès au-delà des attentes
de l’équipe. Pendant la phase de mise en oeuvre de
six mois, on a réduit ou supprimé les médicaments
antipsychotiques de 56 % dans un groupe de 115 résidents
de trois foyers de soins personnels, à savoir Oakview
Place et Tuxedo Villa d’Extendicare et Heritage Lodge
de Revera. Bon nombre de ces résidents sont atteints
de déficience cognitive, dont la démence et la maladie
d’Alzheimer étant les plus communes.
On a réduit surtout les médicaments antipsychotiques
à prendre régulièrement plutôt que ceux administrés
uniquement au besoin. On a aussi surveillé quatre
différentes classes de psychotropes (des hypnotiques, des
antidépresseurs, des inhibiteurs de la cholinestérase et
des stabilisateurs de l’humeur) et diminué le recours à des
hypnotiques, ce qui est un résultat positif compte tenu
des risques connexes importants, comme les chutes et les
fractures, les troubles cognitifs et la sédation.
De manière générale, les évaluations trimestrielles RAIMDS
ont révélé des gains positifs dans les fonctions
cognitives, l’engagement social et les activités de la
vie quotidienne. On n’a d’ailleurs observé aucune
augmentation du recours à des contentions physiques
ou du besoin de soins individuels constants. Selon le
personnel, une fois que les médicaments antipsychotiques
ont été réduits, de nombreux résidents sont devenus
plus réceptifs.
La diffusion
Les ressources et les leçons tirées des projets
d’amélioration TRAIL et P.I.E.C.E.S.™ font partie
des efforts continus déployés au sein de l’ORSW
afin d’améliorer les soins axés sur les résidents. Le
Programme de soins de longue durée de l’ORSW
élabore un programme complet de soins de la démence
et collabore avec un plus grand nombre de foyers de
soins personnels de Winnipeg pour mettre en oeuvre
ces améliorations. Ces efforts portent leurs fruits. Ainsi,
alors qu’en 2010-2011, 29 % des résidents de soins de
longue durée de l’ORSW prenaient des médicaments antipsychotiques sans diagnostic de psychose, en 2013-
2014, ce nombre est passé à 23 %, bien en dessous de la
moyenne nationale de 30 %.
Sur la scène nationale, Allison Bell et Michael Haip
travaillent avec la FCASS à titre de professeurs invités
dans le cadre du projet collaboratif Réduire le recoursaux antipsychotiques en soins de longue durée. Ils
partagent les résultats et les outils du projet TRAIL
avec 15 équipes d’organismes de santé qui s’emploient
à promouvoir l’utilisation appropriée des médicaments
antipsychotiques dans plus de 50 établissements
au Canada.

Allison Bell
gestionnaire de pharmacie,
Programme de soins de longue durée
Office régional de la santé de Winnipeg
Winnipeg (Manitoba)

Joanne DiNicola
gestionnaire des
initiatives,
Programme de soins de
longue durée,
Office régional de la santé de Winnipeg
Winnipeg (Manitoba)

Michael Haip
directeur des outils
RAI-MDS d’aide à la décision,
Programme de soins de longue durée
Office régional de la santé de Winnipeg
Winnipeg (Manitoba)
Pour en savoir plus sur ce projet ou le programme FORCES, veuillez visiter cfhi-fcass.ca/FORCES ou nous envoyer un courriel
à
info@cfhi-fcass.ca.